Ma première incursion, par hasard, dans la littérature japonaise...En fait je n'ai lu ce livre que parce qu'il était inclu dans l'édition collector du "Tombeau des lucioles", mangas de Takahata, superbe au demeurant et dont on parle ici:
https://livrebd.forumactif.com/viewtopic.forum?t=65Vous l'aurez compris, "la tombe des lucioles" est la nouvelle qui a servi de base au scénario de Takahata pour son manga. Dans le livre (Picquier poche) elle est suivi d'une autre nouvelle, "Les algues d'Amérique" que j'en ai profité pour lire également.
Petite présentation de l'auteur: né en 1930, orphelin de mère, il est confié à une famille d'accueil dès la naissance. Il perd sa famille d'accueil suite à la guerre et retrouve son véritable père à l'issue de celle-ci. Il devient ensuite un écrivain sulfureux, traitant des thèmes les plus divers mais dans une volonté affirmée de choquer (pornographie, terrorisme...).
Mon avis: autant le dire tout de suite, le style de Nosaka Akiyuki n'est pas mon préféré. Je ne sais pas s'il est représentatif de la littérature japonaise, d'un courant de la littérature ou simplement de lui-même mais il est vrai que j'ai eu énormément de mal à reconstituer la trame de ses ouvrages et que j'ai finalement été soulagé qu'ils ne fassent que 46 et 69 pages car le style est abrupt, parfois ampoulé, toujours désordonné...L'auteur fait des flashbacks à répétition sans prévenir, sans marquer de temps d'arrêt (surtout dans "les algues...") et il est dur de savoir à quel moment on se trouve. Ce qui est marquant aussi c'est qu'aucun personnage de ces deux histoires ne m'a été rendu sympathique par l'auteur pas même les deux enfants de la tombe des lucioles.
Concernant "La tombe des lucioles" justement: l'histoire est celle de deux enfants dont la ville, Kobé subit un bombardement et qui doivent ensuite survivre par eux mêmes...Le ton est donné dès le départ puisque l'auteur dans les premières pages tue son héros et entame un retour en arrière qui constitue son histoire. Je m'étais abstenu de lire le livre trop peu de temps après avoir visionné l'anime en me disant qu'il fallait absolument que j'évite d'avoir trop présente les images du film...Mais heureusement que j'avais vu le film sinon je crois bien que je n'aurais retiré aucune saveur du livre. Le livre est dur, les personnages ne sont pas attachants, les relations sont particulèrement tendues, il n'y a aucun affect ou presque et les descriptions des bléssés, des morts sont particulièrement détaillés alors pourtant que l'histoire ne fait qu'une quarantaine de pages.
Si je n'avais pas eu le film en tête, je pense que je n'aurais pas réussi à me faire des images mentales de l'histoire.
Si l'anime reprend quasi exactement l'histoire du livre, certaines choses diffèrent: la luminosité du personnage de Setsuko dans le dessin animé est quasi absente dans la nouvelle où elle est beaucoup plus passive, le passage dans la grotte ne fait que quelques pages alors qu'il dure longtemps dans le film et qu'il est magnifiquement mis en valeur, les moments de joie et de grande tristesse qui font tout le piment de l'anime sont montrés différemment dans le livre, sont toujours plus mesurés, dans un sens comme dans l'autre. Bref, le livre est beaucoup plus dur dans son propos que ne l'est le dessin animé et cela met en évidence le travail qu'a du réaliser Takahata pour l'adapter. Personnellement, j'aurais tendance à préférer l'histoire telle qu'elle est présentée dans le dessin animé plutôt que dans la nouvelle. Par contre, il a été dit que l'auteur de la nouvelle, qui a perdu sa soeur pendant la guerre tout en survivant, avait pu voir dans cette nouvelle une façon de faire pardonner sa survie, d'où la dureté du propos probablement puisqu'il se fait violence finalement.
La deuxième nouvelle, "Les algues d'Amérique" parle aussi de la guerre. Dans les années soixante, la femme du héros invite des amis américains (que le héros ne connaît pas) au Japon et la perspective de les recevoir éveille chez le héros des souvenirs de la fin de la guerre et de l'arrivée des américains...On suit en permanence les pérégrinations du héros dans le présent et dans le passé sans aucun avertissement et il faut donc être très attentif à la lecture. Une fois cette habitude prise l'histoire est plaisante, les anecdotes sur les différences de civilisation japonaises et américaines font sourire ou interrogent même si aucune des deux civilisations n'est montrée sous un jour positif. Là encore, je n'ai ressenti aucune tendresse particulière pour les héros qui sont plutôt des anti-héros d'ailleurs...
Bref, finalement "Les algues d'Amérique" m'a davantage plu que "La tombe des lucioles". Cet auteur semble quand même ardu à la lecture. Cette difficulté ainsi que les thèmes abordés réservent la lecture de ces ouvrages à un public adulte.