Editeur : Le Serpent à Plumes
Dépôt légal : juillet 2002
Sur la guerre au Congo-Brazzaville. Très fort.
Les Mata-Mata troupes supplétives du prétendant Mayi Dogo au pouvoir viennent de prendre la télévision et la radio. Leur chef, le Général Giap autorise 48 heures de pillage pour récompenser ses troupes (en fait, il n’a pas l’argent promis pour les payer). La population qui entend cette nouvelle par la radio rassemble les affaires qui ont échappées aux pillages précédents, organisées par les troupes gouvernementales, les gens enterrent ce qu’ils ne peuvent pas emporter avec eux et ils partent sur les grandes avenues de la capitale. Les troupes rebelles décident d’empêcher la population de partir pour éviter que les troupes ennemies « les Tchétchènes » leur échappent. La population ne sait pas où aller, et essaie en vain de se réfugier dans les ambassades étrangères. Finalement, une partie trouve refuge dans l’enceinte du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR). Seuls les réfugiés étrangers sont évacués du pays par les casques bleus, les autochtones sont abandonnés à eux-mêmes. Ils fuient vers les quartiers où les troupes armées ne sont pas encore arrivées. Mais les troupes bombardent ces quartiers pour être sur d’éliminés tous leurs ennemis. Ensuite les soldats quadrillent le quartier. La population fuient encore vers la forêt. Mais là encore les soldats rasent les villages soupçonnés d’avoir aider les Mayi Dogos. Les occidentaux n’interviennent que pour sauver les chimpanzés. Finalement la population qui fuient est regroupée dans des camps de réfugiés, mais le nouveau gouvernement impose ses troupes armées pour retrouver les soldats ennemis qui se cachent parmi les réfugiés. Tous sont soupçonnés et facilement tués. Les soldats rackettent l’aide international et se font payer pour la redistribuer (argent, troc, viol).
Les événements sont narrés par deux personnages :
• Laokolé, jeune fille de 16 ans, qui essaie de fuir les milices avec sa mère handicapée et son jeune frère Fofo,
• Johnny Chien Méchant, 15 ans, soldat chez les Mata-Mata.
Le double point de vue sur les mêmes évènements, le jeu sur le nom fictif des deux ethnies Mayi Dogos et Dogo Mayis (blanc bonnet et bonnet blanc) démontrent bien l’absurdité de la guerre, son horreur et hélas l’impossibilité d’y échapper. Différents personnages donnent leur opinion sur l’origine du conflit et il en ressort que la thèse du conflit ethnique n’explique pas tout, et que la thèse du conflit politique non plus. Les populations sont manipulées pour recruter les troupes supplétives : un mélange d’incitation musclée (on bastonne ceux qui osent exprimer une opinion contraire), d’appel à la solidarité ethnique (on montre des photos de massacres perpétrés par les Mayi Dogo à l’encontre des Dogo Mayi), de caution intellectuelle (c’est un docteur qui s’adresse à la population), et d’appât du gain (les pillages permettent au supplétifs de prendre ce qu’ils désirent).
Le style est très fluide, l’auteur attribue beaucoup de connaissances et de vocabulaire à ces deux narrateurs. L’importance de l’éducation est soulignée à maintes reprises. L’utilisation de deux narrateurs et la mise en perspective d’une scène vécues par Laokolé, puis Johnny puis revue par Laokolé à la télévision est très importante pour nous donner une idée de la relativité de notre vision des évènements, est très bien réussie à mon avis.
Pour en savoir plus : http://members.aol.com/mikecombs/mayimayi.htm - Dogo : en swahili signifie petit – prénom