Baudelaire

C'est un topic trés intéressant, j'ai pris beaucoup de plaisir à le lire.

Je n'apporterai peut-être aucune précision mais j'ai appris que Beaudelaire n'appartenait pas vraiment à un mouvement. Il était en marge du symbolisme, romantisme, et du Parnasse. Cependant ces trois courants exercèrent sur lui une influence.

Beaudelaire nie appartenir au mouvement romantique mais "les fleurs du mal" est souvent classé dans la poésie romantique.

De son vivant, Beaudelaire est "récupéré" par le Parnasse et le symbolisme ; il influencera considérablement ce dernier par sa théorie des correspondances ; qui fait de lui le premier "représentant" du mouvement.

Par ailleurs, Beaudelaire a en commun avec les Parnassiens un travail minutieux sur le vers.

Et il ne faut pas oublier que paradoxalement, le symbolisme s'érige contre et à la fois dans la continuité du Pranasse. Le premier critique justement la place trop importante accordée à la forme par le Parnasse.
Mais tous deux ont en commun une déconnexion totale aux évènements politico/historiques de leur époque, et le désir d'écrire pour une élite, se coupant de la masse populaire.
On retrouve ainsi dans la poésie de Beaudelaire, des caractéristiques de plusieurs mouvements.

J'ai tiré tous ces renseignements d'un "profil" sur les mouvements littéraires du XIX et XX ème siecles.

On trouve aussi une très très forte influence de la poésie et de la culture baroque, notemment l'amour de la mort, l'amour de la femme noire, les poèmes morbides comme la charogne,...

.Au Lecteur, quel magnifique poème...
Il fait partie de mes préférés de Baudelaire.

Des recherches que j'avais faites sur Baudelaire, moi j'avais retenu qu'il a hérité du romantisme la vision du poète en marge de la socièté humaine, c'est à dire qu'il serait plus près de Dieu ou de Satan que du monde terrestre. En fait il fait un refus du monde matériel, et il y a une sorte de lutte entre le haut et le bas : élévation avec le spirituel, le mystique, le génie artistique, et chute avec son morbide, son spleen --> lutte entre le spleen et l'idéal. Et son dernier espoir est la mort.

Mais Baudelaire annonce aussi le symbolisme : les sensations dominent, notamment par l'évocations de parfums, du crépuscule parisien ou des états sensoriels liés à l'angoisse la plus morbide.
Edit Shen: Je me suis permise de mettre le poème en lien dans le titre "le lecteur" pour qu'on puisse savoir de quel poème on parle (et puis il est trop beau lol faut le lire).

Citation :

On trouve aussi une très très forte influence de la poésie et de la culture baroque

Je suis tout à fait d'accord. Pour moi Baudelaire est très "baroque".
Aussi bien dans ces sujets que dans la facon de les aborder.
On y voit quelque chose de très platonicien et, même si les critiques ne seront pas forcément d'accord, parce qu'il n'y a pas de texte fondateur du baroque, je trouve que c'est typique du baroque.

Baudelaire, en dehors de son style si majestueux que l'on peut apprécier de prime abord, vise beaucoup plus haut ( ou plus bas selon les croyances).

Sur l'esthétique de Baudelaire et son rapport au romantisme : Baudelaire considère que la poésie ne nait pas du sujet, mais de l'écriture. Baudelaire, c'est l'art de la forme et non du fond. Il s'agit, dans "une charogne", d'illustrer ce propos et de souligner la tension qu'il peut y avoir entre un sujet trivial et horrible et une écriture travaillée, ciselée à la manière d'un bijou. Il rejette ainsi le Romantisme (auquel n'adhèrent plus les auteurs en cette fin de siècle, mais il transparaît toujours.)

Sur la fonction de la poésie : Baudelaire est proche aussi du Parnasse, mouvement littéraire dont le chef de file est Théophile Gautier (comme cela a été dit ci-dessus, c'est à lui que Baudelaire dédicace les Fleurs du Mal). Les auteurs du Parnasse défendent l'Art pour l'Art et condamnent la poésie engagée, qui se donne pour fonction de dénoncer. L'art est fait pour être beau ; la fonction de l'écriture poétique est de rivaliser avec les autres arts visuels. Pour s'en convaincre, il suffit de lire ne serait-ce que le titre d'un recueil poétique de Th. Gautier : Emaux et Camées. José Maria de Hérédia, autre parnassien, écrit des poèmes essentielement visuels.

Sur le Romantisme : on peut détester, critiquer, railler... nous en sommes les dignes héritiers, même au XXI e siècle : le sentiment de ne pas être en phase avec la société, d'être incompris, la volonté de se ressourcer dans la nature, de voir en elle une expérience métaphysique, l'impression de ne pas être né à la bonne époque... tout cela trouve toujours un écho aujourd'hui. Si le romantisme nous est si proche, il l'est d'autant plus pour un homme de la fin du XIXe siècle.
De plus, il ne faut pas oublier que chaque mouvement littéraire est à la fois prolongement et réaction contre ceux qui ont précédé...

Pardonnez-moi d'avoir remonté ce topic (que j'ai lu attentivement et trouvé très intéressant), mais ... j'aime Baudelaire et j'aime le XIXe siècle. Passionnément.

Ce topic est vraiment intéressant.

J'aime beaucoup Charles Baudelaire, j'ai même lu sa biographie, alors que je n'aime pas trop ça, les biographies.

Je voudrais quand même rappeler que si Baudelaire est fascinant par ses poèmes de spleen, il a su aussi écrire de très beaux poèmes.
A une passante, notamment.

On a tous ressenti ça à un moment donné de notre vie, les rencontres furtives, les regards appuyés, la certitude qu'on aurait pu l'aimer si la vie avait été différente, y penser souvent, même longtemps après. Et savoir que l'autre a aussi ressenti quelque chose de fort, par le dernier vers, que je n'ai jamais oublié : "O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais."

A une passante

La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;

Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.

Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?

Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
O toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais.